Nous ouvrons cette semaine le troisième livre de la Torah, le livre de Vayikra. Comme nous l’avons lu dans les parachiottes précédentes, les bné Israël ont apporté leurs offrandes et construit le Temple portatif et ses ustensiles. Puis une nuée descendit sur le Temple. Moché rabénou attendait avec révérence. Notre paracha s’ouvre avec cette phrase: » Hachem appela Moché et lui parla de la tente d’assignation afin de lui dire… » Imaginons un instant cet événement: Nos sages enseignent que le Michkan fut terminé le 25 Kisslev. Depuis un peu plus de trois mois, les bné Israël regardent cet édifice vide et se demandent si cette construction ne fut pas une perte de temps et d’argent. Finalement, le premier Nissan, la Présence Divine réside enfin dans le Temple. En outre, le Michkan représente le lieu de rencontre entre Hachem et Moché Rabénou. S’il en est ainsi, pourquoi Moché ne pénétra-t-il pas dans le Temple lorsqu’il vit la Présence Divine?
Nos sages, dans le Midrach Yalkout Chimoni, enseignent une leçon terrifiante: » La Torah nous précise qu’Hachem appela Moché afin de nous donner une leçon de courtoisie: un homme ne doit pas entrer chez son ami, à l’improviste, sans que celui-ci l’ait appelé. De là, nous apprenons qu’un sage qui ne possède pas de discernement est pire qu’un cadavre d’animal. » Ainsi, même si Moché Rabénou fut le père de la sagesse, le prince des prophètes, l’homme qui monta au ciel afin de descendre la Torah et qui l’enseigna au peuple… s’il avait enfreint à cette règle de courtoisie, il aurait tout perdu!! Il aurait été pire qu’un cadavre d’animal, nous le dit le Midrach. C’est pour cela que Moché Rabénou patienta jusqu’à l’appel de son Maître, quand bien même avait-il lui même construit ce Temple, et malgré les trois mois d’attente et la pression du peuple .
Nous apprenons de cette paracha combien la courtoisie est importante aux yeux d’Hachem.
Le rav Wolkin chlita insiste souvent sur l’importance d’être spécifique. Chaque peuple possède ses défauts et ses qualités. Nous avons eu la chance, nous les juifs de France, d’avoir reçu en héritage culturel de nombreuses coutumes de courtoisie. Nous devons absolument veiller à ne pas perdre notre spécificité en véhiculant cette courtoisie que nous avons puisée de notre exil.
Cependant, le rav Yonathan Domb soulève une question intéressante: pourquoi le Midrach apprit-il de cette paracha qu’un homme qui ne possède pas de discernement est pire qu’un cadavre? N’aurait-il pas été plus logique de dire: » un homme sans courtoisie est pire qu’un cadavre? » Quel rapport avec le discernement?
Dans un des plus vieux livre de Moussar, Maalot AMidot, écrit il y a plus de sept cents ans, nous trouvons la définition suivante: » le Derer Eretz, la courtoisie, est le fait de réfléchir à ses actions. Lorsqu’un homme doit faire quelque chose, il doit vérifier si cet acte va trouver grâce aux yeux d’Hachem et aux yeux des hommes. S’il pense que son action sera agréée par Hachem et les hommes, qu’il la fasse, ou sinon qu’il s’en s’abstienne. » Ainsi la courtoisie ne consiste-t-elle pas à dire merci ou ouvrir la porte à quelqu’un… La courtoisie est de discerner, à chacune de mes décisions, si je ne vais pas faire quelque chose contre Hachem ou contre mon entourage.
Il nous arrive en effet de croire que nous faisons une grande Mitsva en embrassant le Sefer Torah ou la tombe d’un juste, mais si pour ce faire nous devons pousser quelqu’un, est-ce vraiment une Mitsva? Certains Tsadikim veulent absolument construire leur Souca le soir après le jeûne de Kippour. Pour cela, ils n’hésitent pas à utiliser leur perceuse électrique à 23h. La Torah nous prescrit de vérifier, dans chaque Mitsva, si la bonne action ne s’effectue pas sur le compte de quelqu’un. Mais l’inverse existe également. Nous pensons parfois que la courtoisie nous oblige à faire la bise à toutes les femmes que l’on rencontre, ou à accepter d’aller dans des endroits déconseillés pour faire plaisir à notre entourage. Si la courtoisie va à l’encontre de la Torah, elle est, dans ce cas, négative.
Pour conclure, la Torah, cette semaine, nous demande d’être vigilant. Un juif doit surveiller chacun de ces actes afin de suivre les règles de la Torah et de la courtoisie. En cela, cette dernière ne peut exister sans discernement.
Alors qu’Hachem nous aide à sanctifier son nom en chaque circonstance, et qu’Il nous protège des erreurs, amen ken yéhi ratson.