Comme nous l’avons expliqué dans le texte: Un sacrifice pour sortir d’Egypte, les bné Israël durent se sacrifier pour mériter de sortir d’Egypte. Et, de même que nous devons nous souvenir chaque jour des miracles qu’Hachem fit pour nous, nous devons nous rappeler ce que nos ancêtres firent pour Leur Créateur. Ainsi, chaque juif doit être prêt à donner à Hachem son temps, son amour, son énergie et parfois son argent comme l’illustre cette belle histoire tirée du magnifique livre: Tu raconteras Ses merveilles, volume 3 :
La fête de Pessah approchait et les brises légères annonçaient le début du printemps. Chlomo regarde à travers les fenêtres de son usine. « Ah ! Bientôt Pessah ! Comment vais-je faire ? » Il lui semble ne jamais avoir connu d’année si prospère. Son usine d’alcool tourne à plein rendement, trop pour pouvoir honorer toutes les commandes avant la fête. Chlomo est apprécié des juifs comme des non-juifs. Il a bon caractère et accorde son aide à tous les nécessiteux, quelle que soit leur origine. Tous profitent de sa richesse croissante. Le propriétaire du village, ayant entendu parler de la sagesse de Chlomo, l’avait choisi comme conseiller particulier.
« Je n’ai pas encore vendu mon Hamets. » pense de nouveau Chlomo, soucieux. Chaque année, à cette époque, il prend sa voiture et se rend à la grande ville pour vendre son Hamets au rav. Il ne manque pas de non-juifs dans son village, ni d’érudit qui sauraient procéder convenablement à la vente du Hamets. Mais, par respect pour le rav de la ville voisine, tous les habitants se rendent chez lui. Cela permettait de lui glisser quelques billets pour les fêtes et les noces à venir. Cette année- là, Chlomo a bien l’intention d’y aller, mais il est débordé.
Le lendemain matin, Chlomo va voir Wolf, son ami boulanger, et lui demande d’être son délégué pour vendre son Hamets. Celui-ci accepte sans hésiter. Puisqu’il fait déjà le voyage, pourquoi ne pas rendre service à son copain?
Chlomo lui donne un papier dans lequel sont notés tous les endroits de sa maison et de son usine dans lesquels sera entreposé le Hamets.
Après les deux premiers jours de fête, Chlomo ressent une angoisse lourde dont il ne comprend pas le sens. Le premier jour de Hol Hamoed, il rencontre Wolf à la synagogue. Il s’approche de lui pour prendre de ses nouvelles, alors qu’étonnamment, Wolf fait semblant de ne pas le remarquer. Après la prière du soir, Chlomo l’attend à l’entrée de la synagogue. Il constate qu’il l’a devancé et s’éloigne au bout de la rue. Le lendemain, Chlomo l’attend au coin de la rue menant à la synagogue pour l’empêcher de se dérober. Lorsqu’il le voit s’approcher, il court à sa rencontre.
-Bonjour, mon cher Wolf ! lui lance-t-il. Wolf sursaute, et semble sur le point de prendre la fuite.
-Qu’as-tu mon ami ? Pourquoi m’évites-tu ? T’ai-je fait quelque chose de mal ?
– Pas du tout ! Au contraire, c’est moi qui…qui. J’ai essayé de t’éviter parce que je suis très gêné. Voilà…J’ai oublié de vendre ton Hamets.
-Tu n’as pas vendu mon Hamets, dis Chlomo en pâlissant. C’est une catastrophe. Tu aurais dû me le dire dès le début !
-Comprends-moi: j’avais tellement honte de t’avoir causé un préjudice aussi important. Dit-il en se sauvant.
Ce soir là, Chlomo prie le cœur brisé. Son esprit vif évalue rapidement la situation. Il rentre chez lui la tête basse et s’assied dans la cuisine, totalement abattu. Son épouse, voyant son mari pâle, lui demande :
-Que se passe-t-il?
-Wolf m’a oublié. Il n’a pas vendu mon Hamets.
-Eh bien, vends-le maintenant au premier non-juif venu ! propose-t-elle, ne connaissant pas la loi.
-C’est impossible, on ne peut plus vendre le Hamets pendant la fête.
-Alors que faire ?
-Que faire ? Il faut le brûler !
-Et bien voilà, brûle ton Hamets: pourquoi te mets-tu dans cet état ?
-Tu ne comprends pas, toute mon usine est Hamets !
L’épouse de Chlomo reste figée sur place pendant une minute, n’ayant pas tout de suite compris l’étendue du désastre. Elle retrouve peu à peu ses esprits. Et, avec la grandeur d’âme des femmes juives, elle l’encourage :
-Chlomo ! Va brûler tout le Hamets de l’usine !
Chlomo est à la fois abasourdi et rempli de joie devant la piété de son épouse. Il réfléchit et dit : « Je ne sais pas si je pourrais voir tous nos biens partir en fumée. Peut-être vais-je louer un orchestre pour qu’il joue des airs joyeux… Ça m’aiderait à accomplir cette Mitsva dans la joie. »
Chlomo s’empresse de mettre le feu à tous ses barils d’eau de vie et de bière puis court chercher un orchestre. A la tombée de la nuit, tous les Juifs du village se rassemblent près de l’usine. Chlomo fait un signe aux musiciens et, au son des violons et des tambourins, annonce : « Mes frères. C’est aujourd’hui un grand jour de fête pour moi ! De ma vie, je n’ai jamais eu l’occasion d’accomplir à la lettre la Mitsva d’éliminer le Hamets. Dansons donc et réjouissons-nous d’obéir à la volonté du Créateur ! » Il saute à terre et se mêle à la foule. Il se met à chanter et à danser avec ses voisins, alors que d’immenses colonnes de feu s’élèvent et illuminent le ciel.
Au bruit de l’orchestre, quelques voisins non-juifs arrivent en courant. Ils restent immobiles à regarder le spectacle. Jamais ils n’ont vu chose pareille ! Un nombre impressionnant de barils d’eau de vie est la proie des flammes, et leur propriétaire juif, au lieu de se lamenter, danse de toutes ses forces. Lorsqu’ils comprennent qu’il a l’intention de détruire tous ses biens, ils se précipitent vers les hangars au fond de la cour et sortent quelques tonneaux de bière. Et s’asseyent pour boire au son de la musique. Il ne faut pas longtemps pour que la rumeur circule qu’on distribue de l’alcool gratuitement. Tous accourent sur les lieux.
Lorsque le Seigneur apprend ce qui se passe, il n’en croit pas ses oreilles : « C’est impossible ! Chlomo n’est pas fou tout de même. » Son secrétaire se dépêche d’aller appeler Chlomo, de la part du seigneur.
« Ne voyez-vous pas que je suis pris en ce moment ? Dit-il en montrant du doigt les danseurs. J’accomplis un commandement divin. Lorsque les flammes seront éteintes, je pourrai répondre à la convocation du Seigneur. »
Le secrétaire transmet la réponse au seigneur. Celui-ci devient rouge de colère et réfléchit longuement à la façon de le punir. Lorsque Chlomo arrive chez lui, il s’écrie :
« Chlomo, tu m’as fait honte ! Quelle est cette idée folle que tu as eue ? »
Ce dernier tente, tant bien que mal, d’expliquer au seigneur l’importance de cette Mitsva, mais ce dernier ne veut rien entendre : « Si tu étais un homme ordinaire, cela ne me dérangerait pas que tu deviennes fou et que tu brûles ta fortune. Mais tout le monde sait que tu es mon conseiller. Tu m’as fait passer pour un sot qui prend conseil chez un aliéné ! Ta punition sera exemplaire : je confisque ta maison et je vous renvoie, toi et ta femme, du village. Quitte tout de suite les lieux avant que je te tire une balle dans la peau ! »
La nuit même, il est contraint de quitter le village avec son épouse.
Les Tsadikim disent que les actes de Chlomo causèrent un grand émoi dans le ciel. Un villageois ordinaire qui renonça à tout pour accomplir la Volonté de Son créateur…Un an plus tard, Chlomo eut un fils qui illumina le monde par sa sainteté et sa Torah : le saint Rabbi Haïm de Tchernovits, qui rédigea les fameux ouvrages : Beer Mayim Haïm et Sidouro chel Chabat.