Mouktsé Mékhamat Gouffo: Une chaise cassée (cour n°3)
par Yossef Rozenberg
Mouktsé Mékhamat Gouffo
Une chaise ou un banc dont un des pieds s’est cassé
La règle générale, dans les lois de Mouktsé Mékhamat Gouffo, veut qu’une entité n’ayant pas d’utilité soit Mouktsé. Nous avons vu auparavant qu’un débris d’objet ayant encore une utilité réelle ne sera pas Mouktsé.
Une exception déroge cependant à cette règle: il s’agit d’objets tels une chaise, un banc ou tout autre ustensile ayant des assises cassées, et qui sera Mouktsé bien qu’ayant encore une utilité. Par exemple, un banc à qui il manque un pied qu’on peut maintenir sur un autre banc restera malgré tout Mouktsé.
La raison de cet interdit est rapportée dans le talmud. Nos sages ont craint que l’on en vienne à réparer cet objet lorsque son propriétaire l’ aura vu cassé.
Réparer un objet fait partie de la Mélakha de Boné (construire) selon certains avis, ou de Maké Bépatiche (littéralement « coup de marteau »): il s’agit en réalité de la touche finale de la fabrication d’un objet, qui est un Mélakha distinct de Boné).
♦La question à se poser est : en quoi la chaise en question se différencie-t-elle de tout autre débris d’objet ayant encore une utilité ? Pourquoi celle-ci sera Mouktsé plus que les autres ?
Les Méfarchim expliquent qu »à la différence de tous les débris d’objets, les pieds de la chaise peuvent êtres replacés aisément dans leur support.
Tandis que les débris d’objets en général nécessitent un réel travail de réparation: dans ce cas de figure, le risque que l’on vienne à réparer l’objet n’est pas concret.
On entend par là que la loi mentionnée concernant les chaises ayant perdu leurs pieds s’applique uniquement aux assises vissées ou fixées à la chaise. Dans ce cas, la réparation de l’assise sera simple et rapide, et il y a risque palpable que l’on en vienne à réparer.
Autre cas de figure, un pied de chaise faisant partie intégralement de la chaise, par exemple une chaise en plastique. Puisque sa réparation est élaborée, elle ne sera pas Mouktsé. Il n’y a,pour autant, pas de doute tangible que l’on en vienne à le réparer.
♦Une chaise dont un pied manque sera-t-elle Mouktsé dans tous les cas ?
Comme dit auparavant, une chaise ayant perdu un pied est Mouktsé même s’il est encore possible de l’utiliser dans sa situation actuelle en la maintenant sur un banc ou sur une autre chaise.
Cependant le Beit Yossef, ce que rapporte le Rama, propose un cas de figure dans lequel on pourra toutefois utiliser la chaise en question.
Le Beit Yossef écrit que si l’on a maintenu la chaise sur un banc et qu’on s’est assis dessus de cette manière avant Chabbat au moins une fois, la chaise ne sera pas Mouktsé.
Le Magen Avraham et le Michna Berroura expliquent la raison de cette loi de la manière suivante :
Attendu que la raison du Mouktsé vient du fait que nos sages ont craint que l’on vienne à réparer cette chaise en replaçant l’assise dans son socle, cette situation engendre la Mélakha de Boné ou de Maké Bépatiche.
Lorsque l’on a utilisé la chaise de cette manière précaire au moins une fois, on a prouvé que l’utilisation de cette manière nous convenait et qu’ on ne viendrait pas à la réparer pendant Chabbat.
Nous verrons par la suite que tous les Mouktsé Mékhamat Gouffo peuvent être affranchis de leur statut en les ayant utilisés avant Chabbat. Par exemple, des branches de palmiers qu’on a utilisées une fois avant Chabbat pour une utilité quelconque,dans leur état brut, ne seront plus Mouktsé Mékhamat Gouffo . Nous verrons aussi que différentes entités possèdent diverses lois vis-à-vis de l’utilisation préalable requise pour les affranchir de leur statut.
Dans notre cas de figure, la nécessité d’utiliser la chaise au préalable n’est pas similaire à la règle mentionnée plus haut. En effet, ici, la raison pour laquelle il faut utiliser la chaise avant Chabbat est de prouver que l’on ne viendra pas la réparer puisque son état actuel nous convient. Pour cette raison, il suffira de l’utiliser ainsi avant Chabbat au moins une seule fois.