Il est écrit, dans le traité de Yébamot (62, b), que rabi Akiva avait 24 000 élèves qui se trouvaient depuis Gavat jusqu’à Antipras. Tous moururent en très peu de temps parce qu’ils ne s’étaient pas suffisamment donné de respect les uns les autres. Tous ces disciples disparurent, entre Pessah et Chavouot, d’une mort atroce: la diphtérie. » Le monde ressemblait à un désert, nous dit la guémara, jusqu’à ce que Rabi Akiva aille dans le sud et forme de nouveaux élèves. » De nombreuses questions sont soulevées à propos de cet enseignement:
· Premièrement, comment peut- on dire que le monde ressemblait à un désert?
N’y avait- il pas à cette époque de nombreux sages comme Rabi Tarfon, Rabi Ichmael et d’autres? Il parait évident que ces érudits avaient formé,eux aussi, des milliers d’élèves.
· De plus, comment expliquer qu’ils furent tous punis entre Pessah et Chavouot? Est-ce que, toute l’année, ces hommes s’étaient respectés, sauf pendant ces cinquante jours? Et s’ils s’étaient manqué de respect déjà avant Pessah, pourquoi avoir attendu avant de les punir?
· Enfin, comment expliquer une sanction si sévère?
Pour répondre à ces questions, nous allons essayer de comprendre un enseignement de la guémara: » Si ton rav ressemble à un ange, apprends de lui. Mais sinon, ne sois pas son élève. » En d’autres termes, si ce rav se comporte bien, ne s’énerve pas, parle poliment, éprouve de l’amour pour son prochain, ne cherche pas les plaisirs de ce monde, apprends chez lui. Dans le cas contraire, éloigne t’en.
Encore une fois, essayons de comprendre: si ce rav connaît bien la Torah et l’explique clairement, pourquoi ne pas apprendre chez lui, même si je sais qu’il possède des défauts? Ne puis- je pas prendre sa Torah sans ses mauvais traits de caractère?
Le rav Chlomo Elkabetz explique que la Torah d’un homme se trouve dans son âme. Lorsqu’un rav transmet sa Torah à un élève, il lui donne plus qu’une simple connaissance car lui ancre un peu de son âme. Ainsi, si le rav a un bon fond, il purifie son élève, mais, dans le cas contraire, il peut le dégrader. Les élèves d’un rav sont pour cela considérés comme ses enfants car une partie du rav se trouve en eux.
A présent, nous allons essayer de répondre aux questions soulevées à propos de la mort des élèves de Rabi Akiva. Comme vous le savez, Rabi Akiva vécut juste après la destruction du second Temple. Or nos sages enseignent que ce Beth Amikdach brûla à cause de la haine gratuite qui régnait entre les juifs de cette génération. Et c’est dans ce contexte que Rabi Akiva développa l’importance d’aimer son prochain comme soi- même. Mais, plus que cela, il désira accomplir la réparation de cette faute par toute sa génération afin de permettre la reconstruction du Temple.
Que fit-il pour y parvenir? La guémara, dans Baba Batra, enseigne qu’un rav doit enseigner au maximum à 25 élèves. En outre, nous savons que le peuple d’Israël est constitué, à l’époque, de 600 000 âmes. Ainsi, Rabi Akiva décida de former 24 000 élèves. De leurs ancrer cette amour du prochain afin qu’ils deviennent ensuite les 24 000 rabanim du peuple (24 000 multipliés par 25= 600 000). En diffusant le respect d’autrui et l’amour gratuit aux enfants d’Israël à travers ses élèves, Rabi Akiva pensait réparer la faute qui avait entraîné la destruction du Temple.
A ces fins, il envoya ses élèves de Gavat à Antipat, c’est à dire aux quatre coins d’Israël. Chacun prit une communauté et commença à transmettre la Torah de Rabi Akiva. Cependant, même si les enseignants reçurent cet héritage, cet amour du prochain dans leur âme, cette qualité resta au stade de potentiel. Chaque élève devait développer par soi-même cet amour de l’autre afin de pouvoir le transmettre à son tour. Hélas, à leur niveau, tous échouèrent et ne parvinrent pas à effacer toute la haine gratuite qui résidait en eux, et entre eux. Puisque ces 24 000 élèves se présentaient comme étant l’ensemble des rabanim de cette génération, il y avait un risque qu’ils transmettent cette haine gratuite à tous les enfants d’Israël. Voilà pourquoi Hachem se trouva dans l’obligation de les faire disparaître.
Ainsi, entre Pessah et Chavouot, chaque juif de cette génération perdit son rav. Le monde se trouvait sans professeurs, sans rabanim. Même s’il existait de nombreux sages, ceux-ci étaient dans les maisons d’étude, à l’inverse de ces 24 000 élèves qui avaient pris en main l’éducation des enfants d’Israël. Puisqu’il était de coutume de prendre un peu le deuil pour la mort de son rav, nos ancêtres ont pris sur eux de ne pas de marier ni se couper les cheveux pendant cette période.
Il nous reste à comprendre pourquoi ces élèves sont morts spécifiquement pendant cette période. Comme vous le savez, le midrach Agada nous dit que les bné Israël, lors de la sortie d’Egypte, comptèrent les 50 jours qui les séparèrent du Don de la Torah. Ainsi, cette période représentait le temps nécessaire pour se préparer à recevoir la Torah. Or une des conditions pour mériter la Torah est qu’il y ait la paix et la fraternité entre nous. C’est pourquoi ces élèves qui ne développèrent pas chez eux l’amour du prochain, malgré le potentiel qu’ils avaient reçu, et même pendant ces jours de préparation au Don de la Torah, furent si sévèrement punis entre Pessah et Chavouot.
Chaque année, nous portons le deuil de ces rabanim, qui étaient sûrement les professeurs de nos ancêtres. Mais nous devons comprendre le message de cet acte. Pendant ces jours de préparation, nous nous rappelons chaque année combien il est important d’aimer et de respecter autrui. De même qu’il existe une Mitsva de Téchouva en Elloul, de Simha, de joie en Adar, entre Pessah et Chavouot, nous devons aimer nos prochains afin de recevoir la Torah et voir le troisième Temple très prochainement, amen ken yéhiratson.
Inspiré d’une dracha du rav Yonathan Domb.