Depuis le deuxième jour de Pessah, nous avons commencé à compter le Omer. Comme l’explique le midrach, lors de la sortie d’Egypte, nos ancêtres apprirent qu’ils allaient recevoir la Torah après cinquante jours. Or les bné Israel attendaient ce moment avec une telle impatience qu’ils comptèrent chaque soir le temps qui les séparait de cet événement. En parallèle à cette préparation au don de la Torah, nous portons le deuil des élèves de Rabi Akiva. En effet, il est rapporté dans le traité de Yébamot (62,a) que lors de la période qui sépare Pessah de Chavouot, 24000 élèves de Rabi Akiva périrent d’une épidémie parce qu’ils ne se respectaient pas assez les uns les ‘autres. Chaque jour,plus de 800 érudits disparaissaient. Afin de commémorer cette perte incommensurable, nous prenons sur nous quelques signes de deuil: nous évitons de nous marier, d’écouter de la musique, de nous couper les cheveux…
Même si nous ne pouvons pas comprendre cet enseignement du talmud au sens simple- il s’agissait de grands tsadikim qui pouvaient tous ressusciter les morts-, nous avons cependant le devoir d’apprendre de cette tragédie. Dans un premier temps, il nous faut comprendre pourquoi leur punition fut aussi sévère. Est-ce que le manque de respect est une faute passible de mort? De plus, pourquoi sont- ils tous décédés pendant cette période? Si la guémara nous précisa cette information, il semble évident que celle-ci est porteuse d’un message pour les générations futures.
Pour répondre à ces questions, nous allons expliquer un épisode célèbre du traité Chabat (31,a). Un jour, un non-juif demanda à Chamaï: je veux bien me convertir à la condition que tu m’enseignes toute la Torah alors que je me tiendrai sur un pied. Chamaï prit une règle (pour mesurer) et le repoussa. Le non- juif alla voir Hillel. Ce dernier lui répondit: »Ce que tu ne veux pas qu’on te fasse, ne le fais pas aux autres! Voici toute la Torah, le reste n’est qu’un développement de cette idée ». Le Marcha zal explique que ce converti voulait qu’on lui enseigne la Torah sur un pied,c’est- à -dire qu’il désirait connaître quel était le socle sur lequel repose toute la Torah. Chamaï le repoussa, car pour lui chaque mitsva est extrêmement importante: il n’existe pas de commandement secondaire. Il lui montra une règle pour lui faire comprendre que de même qu’un bâtiment ne peut pas reposer sur un seul pilier, la Torah ne peut se limiter à un seul point. A l’inverse, Hillel pensait qu’il existe une mitsva sur laquelle repose toute la Torah: Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
En effet, nos sages disent que la mission essentielle de l’homme dans ce monde est de se parfaire. Pour cela, il doit s’efforcer de déraciner tout comportement animal afin de ressembler à son Créateur. Or celui qui s’empêche de faire à son prochain ce qu’il ne désire pas qu’on lui fasse est forcément arrivé à extraire de lui-même toute jalousie, toute colère, tout orgueil… Et a donc atteint le but de la Torah. La guémara de Yébamot nous enseigna que les élèves de rabi Akiva manquèrent,à leur niveau, de cet amour d’autrui. Ainsi le pilier central de leur édifice se trouvait branlant. Et puisque ces grands sages devaient être les porte-paroles de la Torah et de ses valeurs, Hachem ne les laissa pas véhiculer une Torah qui ne s’appuyait pas sur l’amour de l’autre.
En outre, comme vous le savez, les jours qui nous séparent de Chavouot sont une période de préparation au don de la Torah. Chaque année,le 6 Sivan, Hachem offre Sa Torah à celui qui la désire. Pendant ces 49 jours du Omer, nous devons nous purifier pour être aptes à ce cadeau magnifique et prouver à notre Créateur combien nous voulons la recevoir. Dans cette optique, nous comptons chaque soir les jours qui nous séparent de Chavouot, à l’image de nos ancêtres. Nous étudions les Pirké Avot (les maximes des pères) qui sont un recueil d’enseignement de morale afin d’améliorer notre comportement et nous devons essayer de nous montrer meilleurs avec nos proches. Car plus nous accomplissons la mitsva d’aimer autrui,plus nous fabriquons une base solide pour supporter la Torah que nous allons recevoir. Les élèves de Rabi Akiva décédèrent à cette époque de l’année pour nous enseigner combien il est important de développer cet amour gratuit et le respect de l’autre pendant ces jours de préparation.
Baroukh Hachem, nous avons entamé le processus de libération qui nous emmènera bientôt au don de la Torah. Mais pour pouvoir profiter pleinement de cette fête de Chavouot, il faut se conditionner au mieux. Pour cela, nous devons tout d’abord construire de bonnes fondations. Alors efforçons-nous,durant les quelques semaines qui arrivent, de faire encore plus d’efforts pour respecter, comprendre et aider chacun de nos proches et amis. Car grâce à ce travail, nous nous purifierons entièrement et nous tiendrons prêts, dans moins de quarante jours, à recevoir la Torah.