Nous assistons dans la paracha de la semaine Bechala’h à un des événements les plus spectaculaires de la Torah: l’ouverture de la mer rouge. Imaginons-nous un instant la tension de cet instant. Depuis trois jours,des millions de juifs, hommes, femmes et enfants se tiennent devant la mer en espérant partir d’Egypte lorsque, soudain, les hurlements des chariots de Pharaon déchirent le silence et déclenchent
une inquiétude générale. A gauche et à droite, des rochers empêchent de passer devant et derrière la mer, et les armées de Pharaon jaillissent. « Que fait Moshé rabénou », s’interroge le peuple?
Rabi Yéouda nous enseigne dans la Mékhilta que les chefs de tribus étaient figés devant la mer et que chacun d’eux refusait d’entrer en premier. Pendant qu’ils discutaient, Narchone ben Aminadav, le prince de la tribu de Yéouha, sauta dans les flots et s’enfonça entièrement dans l’eau. C’est d’ailleurs sur lui que David amélékh écrivit « Viens à mon secours, ô Dieu, car les flots m’ont atteint menaçant mes jours.
Je suis plongé dans la vase d’un gouffre, pas un pouce de terrain pour y poser le pied »(Téhilim 69). Alors Hachem dit à Moché: Mes enfants se noient, les ennemis arrivent et tu restes là à prier! Lève ta main et fends la mer ». Vous connaissez la suite, c’est ce que nous lisons tous les matins « Az yachir Moché… »
Il y a lieu de se demander ce qui poussa Narchone ben Aminadav à se jeter à l’eau. Qu’a-t-il vu de plus que les autres chefs de tribus?
Nous pouvons supposer que le prince de Yéouda fit le raisonnement suivant: est-il vraisemblable qu’Hachem nous demande une chose impossible à accomplir? S’Il nous ordonne de rentrer dans la mer, c’est que nous pouvons le faire. Alors il décida de faire tout ce qui était en ses moyens: il s’avança droit dans les flots avec la
certitude qu’Hachem allait compléter sa part du contrat et allait les lui ouvrir.
Nous aussi, nous sommes confrontés chaque jour à des difficultés dans notre service divin, que ce soit dans l’accomplissement des mitsvot, l’étude de la Torah, l’éducation de nos enfants. Lorsque nous regardons la taille de l’entreprise, un sentiment de découragement nous gagne. Nous ressemblons aux bné Israel devant cette situation sans issue.
Alors nous devons nous rappeler l’enseignement de Rabi Tarfon dans les Pirké Avot: »Ce n’est pas à toi de finir le travail ». Hachem demande à chaque juif de faire ce qui est à sa portée. C’est sûr que l’on ne peut pas devenir un tsadik en un jour, même avec la meilleure volonté. C’est pourquoi nous devons prendre exemple sur
Narchon ben Aminadav et nous jeter dans la mer. Même si les débuts sont toujours un peu difficiles, et que l’eau est froide. Mais, après avoir accompli le premier pas, on s’aperçoit que ce n’était pas si dur.
Chaque juif doit s’efforcer d’avancer de toutes ses forces avec la foi qu’Hachem l’aidera et lui donnera la possibilité d’accomplir sa volonté. Comme il est écrit dans la paracha Nitsavim: « Cette mitsva que je t’ordonne aujourd’hui n’est pas cachée de toi et elle n’est pas éloignée de toi » en d’autres termes: elle est entre nos mains, à notre portée…
Pourtant, nombreux sont ceux qui s’arrêtent devant les difficultés et s’imaginent des montagnes insurmontables. Ils pensent que l’accomplissement des mitsvot est réservé à une élite, aux tsadikim. Certains affirment que de nos jours c’est différent, la nida, c’est impossible, la tsniout, c’est ridicule…Quand d’autres préfèrent tout
simplement nier la présence divine afin de ne pas penser à tout ce qu’un juif doit accomplir.
Ces gens ressemblent à cet homme qui se moqua de Rava dans masseret Chabat (98, a) en disant: « Peuple d’impatients qui avez laissé vos bouches précéder vos oreilles! » Comment avez-vous accepté la Torah sans même vérifier si vous aviez
la force de l’accomplir? A cela, Rava répondit: « Nous, nous marchons avec confiance ». Nos ancêtres n’avaient pas besoin de savoir ce qu »il y avait écrit dans la Torah pour l’accepter car ils savaient qu’Hachem ne les tromperait pas et ne leur demanderait pas de choses impossibles à réaliser.
Baroukh Hachem, Rava nous offrit la boué de sauvetage pour affronter ces doutes et ces épreuves: »Nous, nous marchons avec confiance », répondu-t-il. Nos ancêtres n’avaient pas besoin de savoir ce qu »il y avait écrit dans la Torah pour l’accepter car ils savaient qu’Hachem ne les tromperait pas et ne leur demanderait pas de choses impossibles à réaliser. Alors marchons nous aussi avec confiance, comme des enfants qui suivent leur père. Vivons avec cette intime conviction que tout ce qu’Hachem nous demande est à notre portée. Et à l’image de Narchon ben Aminadav, surmontons nos craintes. Lançons-nous vers l’avant, jetons à l’eau avec la foi qu’Hachem enlèvera les obstacles qui semblent nous empêcher d’avancer, amen ken yéhi ratson.