» Or la Terre s’était corrompue devant Dieu, elle s’était remplie de violence… Dieu dit à Noah: le terme de toutes les créatures est arrivé devant Moi, parce que le vol a envahi le monde…Fais-toi une arche de bois de gôfer que tu diviseras en cellules…Et Moi, j’amènerai sur la terre un Déluge d’eaux pour détruire toute chair animée d’un souffle de vie sous les cieux. Tout ce qui habite sur terre périra. » Béréchit (6, 11-17)
Si nous analysons la façon dont Hachem sauva Noah du déluge, nous pouvons soulever quelques questions: tout d’abord, pourquoi l’ordre de fabriquer l’arche fut-il donné avant même qu’Hachem annonçât Sa volonté d’annihiler les êtres vivants? Puisque la construction du bateau fut entraînée par la tombée des pluies, n’aurait- il pas été plus logique de faire précéder la punition par la fabrication de l’arche?
De plus, il est écrit dans le Midrach Raba que les eaux du Maboul inondèrent la surface de la planète pendant douze mois. Pourquoi Hachem ne rasa-t-Il pas le mal en quelques instants comme Il le fit à Sodom ou contre les premiers nés égyptiens? Enfin, pourquoi le Créateur eut-Il besoin d’une arche pour sauver Noah? Ne pouvait-il pas lui éviter,à lui et sa famille,de ne pas mourir sans résider dans un bateau pendant un an?
Comme nous l’avons déjà dit, la génération du Maboul s’était débauchée de toutes les façons. A tel point,nous enseignent nos sages, que même les animaux, dépourvus pourtant de libre arbitre, se dégradaient à son contact. Les bêtes se volaient entre elles et se dépravaient avec des espèces animales différentes. Malgré cette perversion, Noah resta intègre. Il n’imita pas ses congénères ni dans leurs fautes envers Dieu ni vis-à-vis de leurs frères. Ainsi, ses bonnes actions et sa fidélité envers Hachem le sauvèrent-elles, lui et sa famille,de la perte. Cependant,le Zohar Akadoch (Helek 1, 67, 2) commente le verset de la Haftara de Noah » Car de même que J’ai juré de ne plus désoler la Terre avec les eaux de Noah, ainsi Je jure de ne plus M’irriter contre toi. » Les eaux du Maboul portent le nom de Noah car c’est à cause de lui qu’elles sont venues. Il aurait dû prier pour sa génération comme le fit Avraham avinou pour les habitants de Sodom.
De cette explication très dure du Zohar, nous pouvons apprendre que même si Noah s’était protégé de son entourage et qu’il ne suivait pas leurs mauvaises mœurs, la Torah lui reproche un petit manque de bonté envers son prochain. Car celui qui désire le bien de son ami doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour l’aider. Et même lorsqu’il ne reste que la prière, nous avons une obligation d’épancher nos cœurs face au Maître du monde pour intercéder en faveur de nos prochains. Ainsi, même si cette génération fautait contre Dieu et les hommes, Hachem reprocha à Noah de ne pas avoir assez prié pour elle.
Et c’est donc pour parfaire ce Tsadik, ce nouveau père de l’humanité, qu’Hachem lui ordonna de construire cette arche. Dans ce gigantesque bateau entrèrent sept couples de chaque espèce pure et un couple de chaque espèce impure. Pendant une année complète, Noah et sa famille durent s’occuper de ces millions d’animaux, oiseaux et insectes,et,tout d’abord,les nourrir. Or comme le dit le Midrach Tanhouma, durant ces douze mois, il ne goûta pas la saveur du sommeil afin de s’occuper des bêtes qui mangent la nuit et de celles qui se nourrissent le jour. Ainsi, l’arche de Noah était un camp d’entraînement pour apprendre et ancrer au plus profond de cette famille l’amour de donner à tous, même aux animaux.
Désormais nous pouvons comprendre pourquoi l’ordre de fabriquer le déluge précéda l’annonce de l’épreuve. Car l’arche ne devait pas servir à le protéger des eaux, car même sans cela Hachem aurait pu le sauver. Ce bateau devait essentiellement permettre à Noah et sa famille d’enraciner en eux la bonté, pour que le monde redémarre sur des bases solides. Et c’est aussi pour cela que la punition dura un an, afin que le don devienne une seconde nature chez eux.
A travers l’histoire de Noah, la Torah nous dévoile l’importance de la Mitva de Hessed: être bon envers son prochain.Nous pouvons constater a quel point celle ci est nécessaire pour le maintien de l’humanité. C’est pourquoi nous devons,nous aussi, essayer d’ancrer ce trait de caractère en nous. Pour cela, il nous faut imiter Noah et sa famille, et apprendre à donner aux autres sans compter. En outre, comme nous l’avons vu, il ne s’agit pas uniquement d’une aide financière. La Torah exige que nous nous préoccupions du sort de chacun,de nos proches comme des plus lointains: une parole, un sourire, une prière…nul ne connaît la portée de nos actes. Alors,grâce à cette paracha de Noah, renforçons-nous sur ce point et forçons-nous à offrir à nos familles l’aide et l’affection qu’elles nécessitent. Afin que cet amour déborde vers notre entourage, notre peuple et toutes les créatures que le Maître du monde créa. Nous vous souhaitons un très bon Chabat, et vous disons à très bientôt.
