Le Monde d’Hachem
Comme vous l’avez sûrement constaté, la paracha de Mikets est toujours lue à proximité de Hanouka. Nos sages ont trouvé beaucoup de messages communs entre cette fête et notre paracha. La fin du livre de Béréchit raconte la vente de Yossef par ses frères et leur descente en Egypte. Lorsque l’on réfléchit au déroulement des événements depuis sa vente en tant qu’esclave jusqu’à son ascension au poste de second de Pharaon, puis à la famine qui obligea Yacov Avinou et sa famille à s’exiler en Egypte, nous constatons à quel point ce scénario était l’œuvre du Créateur. Afin de réaliser ce projet qu’Il avait fait connaître à Avraham Avinou, selon lequel les juifs seraient esclaves 400 ans, le Maître du Monde organisa ce plan dans les moindres détails. Ainsi Yossef consola-t-il ses frères en leur disant: « c’est Elokim qui m’a envoyé ici pour préparer votre venue. »
Les philosophes grecs acceptèrent l’idée qu’Une Force fabriquait le monde. Cependant, que cette Force pût s’occuper du quotidien des hommes leur semblait impensable. Est-ce qu’il viendrait à l’esprit d’un adulte de s’occuper de la vie des fourmis? C’est pourquoi, si le monde est l’œuvre d’un Dieu, celui-ci ne s’en occupe pas. Après les miracles de la guerre, dans laquelle 13 cohanim Tsadikim affaiblis par le jeûne mirent en déroute la plus puissante armée du monde, après le miracle de la fiole d’huile qui brûla 8 jours, nos sages instituèrent une prière dans laquelle il est écrit : « Tu as grandi et sanctifié Ton nom dans Ton Monde. » A Hanouka, Hachem prouva aux nations combien Il était le Maître de ce Monde. Et que tout ce qui s’y passe n’est autre que Sa Volonté, Son projet, comme l’illustre cette belle histoire:
A l’époque du roi de Turquie Sultan Maghid vivait Rabi David Karako, un juif craignant Hachem dans la ville de Haskovo, près de la frontière russe (ville qui se situe en Bulgarie de nos jours).Il gagnait sa vie en enseignant la Torah aux enfants de son village. Rabi David avait deux fils, Yossef et Binyamine. Lorsqu’il mourut, Yossef laissa la maison de son père et le poste de professeur à son frère Binyamine, le jugeant trop faible physiquement pour faire un autre métier. A partir du jour où il accomplit cet acte de bonté, Hachem lui envoya la bénédiction dans tout ce qu’il touchait. A tel point qu’il devint en peu de temps très riche. Une seule chose lui manquait, la présence d’enfant dans sa maison. A l’inverse, Binyamine, dont les revenus étaient insuffisants, avait de plus en plus de descendants. A chaque fête, Yossef envoyait de beaux cadeaux à son frère et ses neveux. Binyamine, quant à lui, était devenu un érudit en Torah, et était aimé de tous. Les sages qui se rendaient en Russie avaient l’habitude de dormir chez lui quelques nuits.
Un jour, un des voisins de Binyamine décida de quitter la Turquie pour l’Amérique. Avant de partir, il promit à Binyamine d’essayer de lui trouver un poste de professeur outre-atlantique. Quelques mois plus tard, il reçu une lettre et une carte d’embarquement, lui annonçant qu’on l’attendait pour enseigner la Torah. Le cœur serré, il quitta sa famille en lui promettant de revenir avec de quoi marier ses enfants. Ainsi, pendant trois ans, il trouva grâce aux yeux des juifs d’une communauté. Il officia comme Hazane, comme Mohel et Chohet. Après avoir économisé assez d’argent, il décida de rentrer chez lui. Après de longs jours de navigation, le bateau fit escale quatre jours au port de Marseille. Alors que Binyamine se baladait dans les rues du quartier juif, il croisa le rav de la ville. Celui-ci avait déjà passé quelques nuits chez Binyamine alors qu’il se rendait en Russie. Le rav enlaça Binyamine puis l’invita à passer quelques jours avec lui. Au cours du repas, lerav de Marseille se tourna vers Binyamine et lui demanda s’il voulait fiancer sa fille avec son fils. Binyamine prit cette histoire comme un signe du ciel. Ce garçon plein de crainte Divine et d’amour pour la Torah serait parfait pour sa fille. A la fin du repas, les deux pères s’engagèrent sur les conditions du futur mariage. Le rav s’engagea à donner mille dinarim alors que Binyamine devait en verser cinq cents pour la dote.
Après ces quelques jours, il reprit le bateau en direction de la Turquie. Alors que les voyageurs s’apprêtaient à descendre, une violente tempête éclata. Ce n’est que difficilement que le capitaine arriva à aborder son navire. Les passagers descendirent rapidement encore sous le coup de la panique. Dans cette confusion, Binyamine perdit sa valise qui contenait tout l’argent qu’il avait gagné en Amérique. Malgré tous ses efforts, il ne remit jamais la main dessus. Il rentra chez lui comme il en était sorti, fauché comme les blés. Mais ce qui le chagrinait le plus était l’engagement des 500 dinarim qu’il devait donner dans un an à son futur Hatan. Pour ne pas augmenter la peine de sa famille, il cacha cette histoire de fiançailles et ne la confia à personne.
Le fiancé, comme le veut la coutume, envoya un présent à la fiancée. Seulement, au lieu d’arriver chez Binyamine, le paquet fut livré chez son frère, le riche Yossef. « De deux choses l’une : soit Hachem désire que nous aidions ce couple, soit quelqu’un se joue de nous et il sera puni. » pensa Yossef. En attendant, il envoya, lui aussi, un beau cadeau pour le fiancé. Au cours de l’année, quelques lettres fut échangées. Jusqu’au jour où le fiancé et sa mère partirent en Turquie afin de préparer le mariage. Ils arrivèrent après quelques jours devant la porte de Yossef. Celui-ci les accueillit à bras ouverts et leur demanda des explications.
Or comme Binyamine et Yossef se ressemblaient beaucoup, le fiancé tomba des nues : « Vous ne vous souvenez pas de votre escale à Marseille, lors de votre retour d’Amérique ? » En un instant, tout s’éclaircit dans la tête de Yossef. Ce Hatandevait être le fiancé de sa nièce. Il comprit que son frère avait dû avoir honte de raconter cet événement après l’épisode de la valise. Il rassura le fiancé et lui expliqua qu’il s’agissait de son frère qui habite à l’autre côté de la ville. A cet instant, la femme de Yosef l’entraîna dans la cuisine et lui dit : « Mon cher mari, je vois que toute cette histoire est le fruit de la Providence Divine afin d’épargner ton frère de la honte et de la souffrance. En outre, j’ai entendu un jour à la synagogue que la récompense de celui qui aide des gens à se marier est d’avoir des enfants. Peut- être que grâce à cette Mitsva, Hachem aura pitié de nous et nous permettra d’avoir des enfants à marier. C’est pourquoi je veux que l’on paie à ton frère toute sa part dans le mariage. » Yossef, fou de joie, partit prévenir son frère. Binyamine raconta alors à sa famille toute son escale à Marseille et les accords de mariage. Il accepta l’aide de son frère. Cependant, il refusa de cacher sa situation financière à son futur gendre et décida de l’inviter le soir dans sa modeste maison.
La femme de Binyamine demanda à sa fille, la fiancée, de lui chercher un poulet afin de l’abattre et le préparer pour le repas. La jeune fille, qui était tiraillée entre la joie et la tristesse, ne réussit pas à contrôler ses mains et laissa s’enfuir le poulet. La voilà à la poursuite de la volaille vers l’extrémité du village. Alors que la poule s’était trouvée enfermée dans une ruine, la fiancée met la main sur des vieux vêtements abandonnés dans ce lieu désert. Soudain, le bruit d’une pièce qui tombe attira son attention. Elle saisit le vêtement, le sortit au grand jour et s’aperçut qu’il était plein de pièces d’or anciennes. Elle apporta ce trésor à son père. Celui-ci,emporté par la joie, remercia Hachem pour ce miracle. Avec cet argent, il put payer la dote et une maison pour le jeune couple.
Deux mois plus tard, lors du repas du mariage, Binyamine raconta les miracles et les péripéties qu’il avait vécues,et remercia Hachem pour toute sa bonté. Alors la femme de Yossef éclata en sanglots. Elle raconta qu’elle avait espéré accomplir cette Mitsva afin de mériter cet enfant qu’elle désirait tant. Le rav de Marseille et l’ensemble des convives se levèrent et la bénirent pour que, par le mérite de ce bon cœur , Hachem exauce sa requête. Et en cette même année, la femme de Yossef enfanta un fils qui perpétua la lignée des Karako jusqu’à ce jour.
Les chemins d’Hachem sont incompréhensibles. Cependant à travers de l’histoire de Hanouka et de nos ancêtres nous pouvons comprendre à quel point le Créateur nous guide tel un GPS en terre inconnue. Alors ne quittons la route afin d’arriver à bon port, Amen Ken Yéhi Ratson. A partir d’une histoire du rav Menahem Ménaché d’Ahavat Haïm.