Pirké Avot: Pour que la sagesse de la Torah repose en toi
Par Itshak Nabet
Nous lirons le troisième chapitre des maximes des pères. Dans la neuvième Michna, il est écrit:
» Rabi Hanina Ben Dossa disait: la sagesse réside chez celui dont les bonnes actions sont plus nombreuses que sa sagesse. Mais elle ne réside pas chez celui dont la sagesse est supérieure à ses bonnes actions. »
Si on réfléchit à cet enseignement, nous pouvons relever certaines questions. Premièrement, est-il possible de faire plus que ce que notre connaissance permet? A priori, on ne peut appliquer que ce qu’on a appris. Une personne qui ne sait pas qu’une mitsva consiste à mettre des téfilines ne peut pas se lever un matin et en fabriquer! Alors que veut signifier ce Rav en disant que la Sagesse réside chez celui dont les bonnes actions sont supérieures à sa sagesse?Et qui,en outre,continue en disant que cette dernière ne repose pas chez celui qui ne fait pas ce qu’il connaît,alors même que nous voyons de nombreux grands penseurs, philosophes ou médecins remplis de sagesse malgré leur mauvais comportement?
Pour essayer de répondre, nous allons ouvrir une petite parenthèse. La Torah nous raconte dans le livre de Béréchit la vie de deux frères jumeaux: Yaacov avinou et Essav. Le premier deviendra le père fondateur de notre nation et le second l’ancêtre du monde occidental. « Les jeunes hommes grandirent: Essav fut un homme qui connaissait le gibier, un homme des champs. Et Yaacov était un homme simple, qui résidait dans les tentes » nous dit le verset. Nos sages expliquent que la Torah répéta le mot « homme » dans sa description d’Essav pour nous dévoiler sa double personnalité. D’un côté, « il connaissait le gibier », il apportait à manger à son père Itshak avinou. Et lors de ces entretiens, il se détachait du monde matériel, étudiait avec ferveur et se rapprochait d’Hachem…Mais dès qu’il sortait dans les champs, il devenait un autre homme. Malgré les nombreuses connaissances qu’il possédait, il n’arrivait pas à surmonter son mauvais penchant et à soumettre ses pulsions au service divin. En d’autres mots, sa tête était bonne mais son corps ne suivait pas. Et c’est d’ailleurs pour cela que sa tête fut enterrée avec Avraham, Itshak et Yaacov avinou dans la grotte de Marpela. A l’inverse, « Yaacov était un homme simple qui s’asseyait dans les tentes ». Qu’il soit dans les maisons d’étude ou en dehors, il restait le même. Il s’efforçait de mettre en application tout ce qu’il apprenait, sans se poser de question, simplement parce ce que c’est la volonté d’Hachem.
Comme nous l’avons déjà dit, la Torah n’est pas un livre d’histoires. De chaque lettre, nous apprenons des leçons, des conseils pour toutes les générations…Nous devons comprendre,lorsque nous lisons ce texte, que ce comportement d’Essav existe en chacun de nous à un degré différent. Nous possédons de nombreuses connaissances que nous n’appliquons pas. Nous savons tous qu’il ne faut pas s’énerver, ne pas dire du mal des autres…mais dès que nous sommes sur le terrain, dans nos propres « champs », nous nous laissons guider par nos pulsions et nos désirs, et nous fautons. Même si nous lisons le livre du Hafetz Haïm depuis des années, rien n’y fait!!Et ceci est vrai dans presque tous les domaines. Si nous analysons nos journées, nos prières, nos relations avec autrui…nous pouvons réaliser à quel point nous n’appliquons pas ce que nous savons. Et,pire encore, un homme peut aller à des cours de Torah chaque semaine pendant des années sans pour autant changer d’un iota. Comment, me direz vous,est-ce possible?
Voilà ce qu’est venu nous enseigner Rabi Hannina Ben Dossa. Si tes actions sont supérieures à ta sagesse,alors ta sagesse résidera, c’est-à-dire te servira à évoluer. Seulement si tu es prêt à appliquer même ce que tu ne connais pas, à l’image de nos ancêtres qui dirent « Naasé Vénichma »(nous ferons et nous comprendrons), alors la Torah t’aidera à changer. Et c’est pourquoi le Ramban zal demanda à son fils dans sa lettre « dès que tu as fini d’étudier,cherche dans ce que tu viens d’apprendre s’il y une chose que tu peux appliquer. » Mais si un homme voit la Torah comme une belle sagesse, comme un livre de philosophie qui ne l’oblige pas à changer, alors,effectivement, vaut mieux qu’il n’étudie pas. Car cette Torah ne pourra pas reposer en lui,et le faire évoluer.
Ainsi le rav de cette maxime est-il venu nous apprendre par quel moyen la Torah peut aider un homme à s’améliorer. Si nous désirons réellement avancer, nous devons essayer de trouver dans tous les cours que nous entendons et que nous avons déjà écoutés ce que nous pouvons appliquer! Même si nous ne prenons sur nous que de toutes petites résolutions à chaque cours, avec le temps les résultats sont considérables. Ainsi en effectuant ce travail pendant les quelques jours qui nous séparent de Chavouot, nous pouvons prouver à Hachem que nous considérons Sa Torah non comme une science, mais bel et bien comme un guide pour nous perfectionner et nous rapprocher de Lui. Nous vous souhaitons un très bon Chabat et vous disons à très bientôt.
Dvar Thora inspire de Si’hot hit’hazkout sur Hannouka